Au premier avril dernier, un arrêt de la Cour européenne de justice ramenait l’assurance autonomie au devant de l’actualité belge. L’objectif d’une telle couverture est d’aider les personnes à faire face aux frais qui ne sont pas des dépenses de soins de santé mais qui sont inhérents à la perte d’autonomie

Rappelons
d’abord l’essentiel: une telle assurance est une nécessité pour bon nombre de
seniors ou de personnes handicapées en situation de dépendance partout en
Belgique, au sud comme au nord du pays.  En statuant dans ce dossier, la
Cour européenne de justice donne des arguments supplémentaires à ceux qui,
comme la Mutualité chrétienne ou l’UCP (le mouvement social des aînés), pensent
que ce dossier devrait être traité au niveau fédéral.

Pour la Cour européenne de justice, la réglementation
flamande est de nature restrictive à la libre circulation. Les travailleurs
migrants "exerçant ou envisageant d’exercer une activité salariée ou non
salariée dans l’une de ces deux régions (Bruxelles ou Wallonie, ndlr),
pourraient être dissuadés de faire usage de leur liberté de circuler et de
quitter leur État membre d’origine pour séjourner en Belgique, du fait que leur
installation dans certaines parties du territoire belge comporterait la perte
de la possibilité de bénéficier de prestations auxquelles, autrement, ils
auraient pu prétendre".

L’avis de la Cour semble ramener le débat dans le
champ des droits des citoyens liés au droit du travail, et partant de là, à la
Sécurité sociale. Cet aspect n’est pas sans importance. Mais notre propos n’est
pas de combattre une initiative prise au Nord de notre pays mais plutôt de voir
ce qu’il y a lieu de faire pour l’ensemble de notre population.

La question est plutôt celle-ci: l’Etat fédéral dispose-t-il des outils et
des moyens pour organiser une couverture des besoins de tous ses citoyens?

La revendication d’une meilleure prise en compte des besoins des personnes,
liés à leur état de dépendance n’est pas neuve. Il s’agit de la mise en place
d’un système qui, rattaché à une Sécurité sociale forte et solidaire, permette
à chacun, se trouvant en situation de perte d’autonomie, de bénéficier des
ressources pour pouvoir y remédier.

De quelles interventions parlons-nous? Il s’agit des aides à domicile, des
interventions dans les frais de déplacements, des frais de garde à
domicile,…  La nature de ces aides implique naturellement une articulation
avec le pouvoir régional. Le soutien légitime à apporter aux bénéficiaires en
termes de revenus doit certes venir de la Sécurité sociale, mais par contre
l’organisation de ces services doit venir des Communautés et Régions.

Dans les facteurs qui nous obligent à réfléchir ces politiques, il faut en
prendre plusieurs en considération.

Le nombre de personnes devant recourir à des aides afin de préserver leur
autonomie ira bien sûr en augmentant dans les années à venir. Mais, il ne
s’agit pas seulement de faire face à l’augmentation du nombre d’aînés, liée au
vieillissement de la population. En plus de l’impact purement numérique de
l’évolution démographique, des conséquences humaines et sociales ne doivent pas
être occultées pour les personnes concernées évidemment, mais aussi pour les
aidants des personnes dépendantes dont nous avons déjà eu l’occasion de mettre
en évidence les besoins en termes de soutien, de période de répit, de
coordination des aides,…

Dans nos revendications, lors des dernières élections fédérales de juin
2007, nous proposions une solution.

Il existe actuellement un système résiduaire, l’allocation d’Aide aux
Personnes Âgées (APA), dont l’accès est limité aux personnes combinant à la
fois une perte d’autonomie médicalement avérée et des ressources réduites. Les
limites sont aujourd’hui de 10.609,19 euros par an et de 13.257,08  euros
par an, selon les situations de ménage. Nous demandions de supprimer la prise
en compte des ressources pour l’octroi de cette aide, l’intégrant ainsi dans
notre système de Sécurité sociale.

Cette revendication a bien entendu un coût qu’il est possible d’estimer. En
mai 2007, il y avait 125.429 bénéficiaires de l’APA pour un budget annuel
estimé à 392,3 millions d’euros. Sur base de la répartition par âge et par
catégorie de handicap reconnu dans le système de l’APA, un élargissement aux
non-bénéficiaires actuels conduirait, selon nos estimations (basées sur les
pensions légales), à reconnaître près de 65.000 personnes de plus. Ce qui, du
fait des différents niveaux d’aide possibles, conduirait à une augmentation du
budget de près de 250 millions d’euros.

Il existe également différentes interventions
organisées sous forme de forfaits: forfaits malades chroniques, forfaits
incontinence,…  Une réflexion sur une simplification de ces interventions,
un certain regroupement des moyens avec ceux de l’APA, pourraient conduire à la
mise en place d’une intervention globale de la Sécurité sociale au profit des
personnes dépendantes.

[…]

Alda Greoli

Secrétaire nationale

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