Les
Grand-Mères
Maintenant, je suis grand; je viens
d’avoir neuf ans.
J’habite chez ma grand-mère. J’ai aussi
une maman.
Je la vois en week-end, une petite fois
sur deux :
Ça dure pas très longtemps, c’est
toujours entre deux.
Entre deux choses urgentes ; elle
est toujours pressée.
Je crois qu’elle travaille trop ;
elle dit qu’elle est stressée.
Dommage qu’elle vienne si peu, j’aime
tant l’embrasser !
Mon père, un grand savant, j’ai peur de
le lasser
Quand je dis des bêtises, pendant les
grandes vacances.
Mais tout cela n’est rien, car moi,
j’ai de la chance …
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Ma chance, c’est ma grand-mère. Et ceux
qui n’en ont pas,
Comme Etienne, à l’école, eh bien, ils
n’aiment pas ça.
Etienne, c’est un copain : alors,
je lui explique,
Ce qu’est une grand-mère, sans mots
trop scientifiques.
Les grand-mères sont très
vieilles ; elles ont toujours le temps.
Elles ne se pressent jamais, mais elles
font tant et tant,
Qu’à la fin d’une journée, tout le
travail est fait.
Elles disent qu’elles sont rompues , que ce sont les effets
De leur âge bien trop vieux . Pourtant, elles sont partout,
Même si elles meurent souvent, bien
plus souvent que nous.
Les grand-mères, c’est dommage, n’ont
pas d’enfant à soi.
Alors, elles se rattrapent, s’occupent
et s ‘apitoient,
Avec tous ceux des autres qu’elles
aiment comme des mamans.
Dès qu’on en a besoin, elles disent
toujours présent
C’est pour ça qu’elles s’appellent
Mamie ou Bonne-Maman.
Elles ont toutes des lunettes et
certaines de fausses dents.
Comme elles ne travaillent pas, elles
ne font qu’être là.
Elles peuvent avoir des chiens, mais
elles préfèrent les chats.
Parfois, un peu trop grosses, elles
souffrent pour se baisser,
Mais rangent toutes nos affaires sans
jamais se lasser.
Elles grondent parfois un peu, mais
c’est presque en riant ;
Ça ne donne pas envie d’être
désobéissant.
Elles savent les belles promenades où
l’on prend bien le temps
Où l’on court, on gambade, on joue,
tout en criant.
Jamais de dépêche-toi, on va être en retard,
Chaque chose vient en son temps, rien
ne nous contrecarre.
Elles expliquent les oiseaux, les
feuilles, les peupliers,
Les chevaux, les facteurs, les vaches,
les cantonniers,
Les limaces, les cerises, les pigeons
et la crèche,
La politique, les gens, la chasse et
même la pêche.
Elles savent beaucoup de choses et que
rien ne complique,
Mais qui sont passionnantes et aussi
très pratiques.
Si elles vont pas très vite, elles vont
toujours au but ;
Elles connaissent les façons, les
manières, le vécu.
Si leurs cheveux sont blancs, c’est
pour que, dans la nuit,
Quand elles nous disent bonsoir, nous
embrassent dans nos lits,
On puisse les voir encore, toutes les
lumières ôtées,
En rêvant des histoires qu’elles
viennent de raconter.
Raconter des histoires, c’est leur
spécialité ;
Des tristes ou rigolotes, elles savent
des quantités.
Les grand-mères comprennent tout et puis elles nous
consolent.
Elles essuient bien nos joues et alors
nous cajolent.
Elles nous embrassent souvent ;
elles peuvent tout pardonner.
Même quand on est méchant, elles savent
nous raisonner.
Elles sont souvent gourmandes, elles
nous font des gâteaux,
Et manger avec elles est une vie de
château.
Une maison sans grand-mère, n’est pas
une vraie maison.
C’est mieux que la télé, la radio, les
chansons.
Ce sont comme des mamans qui seraient à
la retraite,
Et qui pour les enfants, connaissent
toutes les recettes.
Ce sont
un peu des fées comme on voit dans les contes,
Des fées
un peu plus vieilles que celles qu’elles nous racontent.
Il faudrait que chacun, puisse avoir
une grand-mère ;
Pour mon ami Etienne, ce serait moins
amer.
Même s’il a une maman, il lui manque
une mère-grand,
Pour lui dire la campagne et la neige et le vent.
Il m’a donc demandé de lui en trouver
une,
Mais ne sachant comment combler cette
dure lacune,
Je demande à grand-mère si elle a des
amies.
Ou peut-être par annonce ? Avec
des garanties ?
Elle a presque pleuré. Et puis, elle
m’a sourit.
Rien ne vaut une grand-mère, c’est moi
qui vous le dit.
Jacques Grieu
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