De l’organisation au sein de l’hospice à l’organisation autour de l’EHPAD ?
Il y a 350 ans, St Vincent de Paul et ses contemporains avaient créé les hospices pour accueillir de façon hospitalière les pauvres, les indigents et les incurables, selon des préceptes humanistes…
Leurs successeurs, mus par des règles strictes (pour ne pas dire peu charitables), ont utilisé ces hospices pour enfermer ces pauvres, ces indigents et ces incurables et protéger ainsi la société de ceux-ci, enfermés dans des dortoirs, pour certains, de 50 lits, voire plus (sûr qu’il y avait de la vie sociale dans ces dortoirs, mais plutôt basée sur… la loi de la jungle)…
Puis, il y a presque 40 ans, au siècle dernier, la société française décida de supprimer ces hospices, en les « humanisant » (même s’il reste encore aujourd’hui des bâtiments encore de type hospicial, avec des chambres à 3, 4 lits). L’hôpital général ou rural (puis local) devint le pivot de la coordination gérontologique et accueillit des services de long séjour, bénéficiant du plateau de soins hospitaliers. Des maisons de retraite se créèrent (pour certaines, même si elles étaient publiques, toujours dirigées par des congrégations de sœurs, celles-ci disant ce qui était bien pour le résident), « médicalisées » ou pas. En fait s’installait ainsi (depuis le logement-foyer ou foyer-logement) un parcours résidentiel pour la personne en fonction de l’évolution de son état de santé et de ses besoins « médicosociaux » (concept strictement franco-français), pardon, en fonction de l’évolution de sa « dépendance » (concept strictement franco-français), les médecins gériatres remplaçant progressivement les sœurs pour décider ce qui était bien pour la personne…
Puis, au tournant du siècle, une réforme « médicalisa » les maisons de retraite, en affirmant qu’elles accueilleraient des personnes âgée « dépendantes » (avec son corolaire de l’institution d’un médecin coordonnateur et d’une infirmière référente), réforme qui devait (hum…) permettre, normalement, à la personne ayant quitté son domicile personnel de rester dans son nouveau domicile communautaire sans devoir changer de domicile chaque fois que son état se dégradait (cela devait être les prestations qui auraient évolué en cas de dégradation de cet état). De plus, début 2002 vit la reconnaissance législative et réglementaire des réseaux de santé gérontologique et aux filières gériatriques…
Et aujourd’hui ?
A l’aube de l’adoption des projets régionaux de santé et de leurs schémas d’organisation, après une phase accrue de décentralisation départementale qui semble se prolonger par une recentralisation régionale, à travers les pouvoirs des agences régionales de santé (accentués si, face à celles-ci, les conseils généraux n’ont pas de politique gérontologique affirmé), il n’est pas forcément facile au directeur d’EHPAD d’avoir une vision stratégique et prospective de l’avenir de sa structure :
entre une tarification actuelle qui pénalise toute démarche de rendre les résidents plus autonomes au niveau fonctionnel et une xième réforme de la tarification qui, à l’instar de la T2A hospitalière, pourrait entraîner la sélection de « cas » rentables en actes,
entre l’intérêt qu’il aurait de développer une coopération avec d’autres EHPAD, ainsi
que le milieu hospitalier et ses services ambulatoires (équipe de secteur psychiatrique, filière gériatrique avec, entre autres, son équipe mobile gériatrique, service de soins palliatifs, service d’hospitalisation à domicile, etc.), si tant est que ce milieu ait les
moyens de ses ambitions, et la peur que l’Etat et le Conseil général ne
veuillent, à plus ou moins long terme, fusionner les structures ensemble, pour
faire des économies d’échelle,
entre
les terminologies de plateformes de service, puis de répit, de case-manager, de
tables stratégiques, de tables tactiques et autres services communautaires (acceptions qui ont des significations
précises en français… du Québec…), et la nécessité d’être acteur pour
développer tout simplement de nouvelles réponses sur son territoire de
proximité, pour répondre aux besoins peu ou prou couverts ou émergents sur ce
territoire,-
etc.
Mais, plutôt que de subir ces évolutions, floues, et d’être de faire des choix stratégiques par défaut ou par opportunisme (du fait des enveloppes rendues possible par un xième plan Alzheimer…), ne serait-il pertinent, pour le directeur d’EHPAD, de réfléchir, avec ses partenaires locaux (sociaux, médicosociaux, sanitaires, etc.), à un nouveau concept, « autour de l’EHPAD » (et non plus qu’en son sein, donc « hors mur »), à l’instar des exemples d’Europe du Nord (comme au Danemark, où il n’y a plus de construction de nouvelles maisons de retraite depuis 1987, mais où l’on met les moyens des maisons de retraite sur le « domicile ») ou des réflexions menées en France, dans ses territoires… ultramarins (St Pierre et Miquelon et Mayotte, par exemple)… ? Ou comment de difficultés, voire de retards, sur un territoire en faire un laboratoire d’innovation sociale, médicosociale et sanitaire pour le reste du pays…
Jean-Michel CAUDRON
Commentaires récents