Auteur : Sébastien Charrière

Le tarif, le coût, le reste à charge, le ticket modérateur, la déduction fiscale, la charge financière, la participation de la caisse, du conseil général, de mutuelle, les exonérations. Les services à domicile ont nécessairement et inévitablement un coût.

Coût pour la personne bénéficiaire de la prestation qui y regardera de près et qui, logique de porte-monnaie oblige, déterminera son besoin en fonction de la participation dont il bénéficiera (en pratique, on constate que finalement de nombreux bénéficiaires déduisent leurs besoins en aide d’un calcul de déduction entre le coût de la prestation et la participation du tiers financeur). Coût pour la communauté que ce soit par le biais du département financeur de l’APA, de la CARSAT ou d’une mutuelle (le besoin en aide étant évalué par des critères toujours plus restrictifs chaque année, les plans d’APA n’étant plus ce qu’ils étaient auparavant ou le tableau de scoring mis en place dans le cadre des évaluations CARSAT écartant encore plus de monde qu’autrefois, on constate là également un écart plus grand entre le besoin réel et le besoin évalué qu’il y a quelques années).

Ce coût tend à devenir, tant pour le secteur non lucratif que pour le secteur lucratif (étant entendu que lucratif ou non, chacun a nécessairement besoin que l’argent rentre et chaque prestation aura indubitablement un coût) le nerf d’une guerre qui conduit de nombreuses familles à envisager de plus en plus à se passer des structures et à choisir l’emploi direct comme mode d’organisation de l’aide à domicile. Récemment, la fille d’un usager me fait comprendre que son besoin d’heures supplémentaires pour pouvoir aider son parent l’a conduit à réfléchir sérieusement à la question de passer en emploi direct sans passer par le mandataire : après différents calculs, elle était arrivée au constat que l’économie sera libératrice pour elle et la fratrie. Aucune écoute et dialogue n’a été possible à partir de là : le danger d’un arrêt maladie et d’une absence de remplacement ? « Quand on voit que c’est jamais la même remplaçante, j’y perdrais pas au change » (vous voyez le rapport vous ?) ; le risque d’une prestation de moindre qualité ? « je suis de prêt tout cela, ce n’est pas un problème » ; vous allez être employeur et vous prenez des risques ? « non, je me suis renseigné », c’est-à-dire ? « on n’a pas de contrat de travail à faire en dessous de X heures, blablabla »…. « et de toute façon, c’est bien moins cher ». Que voulez-vous répondre à cela ? Au final, quand le coût est le point noir, le coût gagne à tous les coups et le reste c’est du flan. Surtout lorsque les financeurs ne vous facilitent pas la tache et que, jamais, oh non jamais en face de vous, ils font comprendre l’air de rien à l’usager qu’en emploi direct, cela leur coûterait bien moins cher…

La collectivité ne doit pas accepter cela. Peut être que certains ne seront pas d’accord mais j’estime que l’emploi direct dans l’aide à domicile lorsqu’il s’agit de la dépendance (si on prend la référence classique de la grille AGGIR, on considérera les GIR 1 à 4), sans a minima être accompagné au moins dans le rôle d’employeur devrait être purement et simplement interdit. Que l’accompagnement se fasse par la Fepem, fédération du particulier employeur, une association ou une entreprise, peu m’importe. Je n’écris pas aujourd’hui en tant que responsable dans une structure d’aide à domicile. J’écris en tant que professionnel de l’aide à domicile et de la dépendance et qui sait combien il est difficile d’être employeur et ce que cela implique. Le quotidien d’une équipe de direction est loin d’être de tout repos, être en règle avec les obligations législatives sociales et fiscales est loin d’être à la portée de tous et, que ce soit dans la métallurgie, l’aide à domicile, la vente ou n’importe qu’elle autre activité, de nombreux dirigeants s’arrachent chaque jour les cheveux pour ne pas être « trop » en dehors du cadre législatif.  En outre, le juge, comme vous avez pu le voir dernièrement avec mes différents écrits sur des prud’hommes vécus par des particuliers employeurs publiés sur le site www.lamaisondelautonomie.com, est régulièrement saisi d’actions de salariés qui auraient pu être évitées avec un simple bon conseil de la fonction d’employeur. D’autant que le tarif de base qui pourrait être proposé pour simplement répondre aux questions que se posent les particuliers employeurs peut être largement abordable (la Fepem propose un accompagnement à l’année en ce sens à un coût des plus abordables, de même que les centres de ressource UNA qui, parmi leurs prestations aux particuliers employeurs, proposent aussi ce genre d’accompagnement). D’autant qu’un prud’homme peut faire mal (des prud’hommes peuvent faire tomber une structure, un particulier peut s’endetter à vie à cause d’un prud’homme). Cela ne résoudra pas les difficultés vécues par de nombreuses structures mais humainement, si au moins le particulier employeur face à la dépendance pouvait éviter en plus d’avoir à supporter les tracas d’un employeur, et par ricochet, si cela peut permettre au salarié embauché d’être mieux respecté dans ses droits, je dormirais (peut-être) un peu mieux…