Auteur : Sébastien CHARRIERE
Selon l’article 13 de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999, « le décès de l’employeur met fin ipso facto au contrat de travail qui le liait à son salarié ». Qu’implique la locution latine « ipso facto » ici ?
Pour mémoire, l’article 13 de la convention collective, intitulé « Décès de l’employeur » et placé juste après l’article 12 sur la rupture du CDI à l’initiative de l’employeur et juste avant l’article 14 sur le certificat de travail et attestation ASSEDIC (NDA : cette dernière étant désignée attestation pôle emploi) dispose que :
« Le décès de l’employeur met fin ipso facto au contrat de travail qui le liait à son salarié. Le contrat ne se poursuit pas automatiquement avec les héritiers. La date du décès de l’employeur fixe le départ du préavis.
Sont dus au salarié :
-
le dernier salaire ;
-
les indemnités de préavis et de licenciement auxquelles le salarié peut prétendre compte tenu de son ancienneté lorsque l’employeur décède ;
-
l’indemnité de congés payés. »
On le voit, le décès de l’employeur est bien considéré comme une forme de rupture du contrat de travail tant par son positionnement entre les deux articles 12 et 14 précités que par les précisions apportées par l’article 13 précisant que le décès met fin au contrat et que la date de celui-ci en fixait le départ du préavis. Les conséquences étant notamment d’entrainer le versement de l’ensemble des salaires et indemnités dues en cas de rupture du contrat à l’initiative de l’employeur.
A priori, sin on se tient à la lettre de la convention collective, le décès entraine de fait sans qu’aucune action quelconque ne soit faite la rupture du contrat de travail et cela s’oppose au salarié du particulier employeur. Une procédure classique de rupture du contrat de travail à l’initiative d’un employeur exige pour faire courir le préavis un préalable incontournable de la convocation à un entretien préalable et de l’envoi d’une lettre de licenciement, élément déclencheur du préavis. Ici, le texte de la convention collective nous précise bien que le décès à lui seul entraine le départ du préavis, le décès mettant fin ipso facto au contrat de travail, on aurait pu en déduire légitimement qu’en dehors des « dus au salarié », aucune procédure particulière ne devait être entamée.
La chambre sociale de la Cour de cassation est néanmoins venue rappeler le 26 septembre dernier (Cass. soc. 26 septembre 2012, n° 11-11697) que le décès de l’employeur, ne constituant pas un cas de force majeure, ne rompt pas automatiquement le contrat de travail, une disposition conventionnelle ne pouvant contrevenir à cette règle.
Toutefois, ne nous méprenons pas. Le décès de l’employeur reste bien une cause de rupture du contrat de travail mais cette cause n’implique pas que le contrat soit rompu automatiquement. Peut-on pour autant affirmer que cette cause doit être mise au même niveau que toutes les autres causes de rupture du contrat de travail ? Une faute disciplinaire peut être une cause de rupture de contrat de travail mais pour que la rupture soit consommée, il est nécessaire de respecter toute la procédure de A à Z, de la convocation à l’entretien préalable à la notification du licenciement. Doit-on dès lors suite au décès de l’employeur, exiger des héritiers (s’il y en a !) de convoquer à un entretien préalable le salarié, de le recevoir, puis de prendre sa décision et de notifier par écrit le licenciement justifié sur le décès de l’employeur ?
A notre sens, cela serait extrêmement lourd et sans aucun intérêt. D’ailleurs, la Cour de cassation a rendu sa décision au visa de l’article L. 1232-6 du Code du travail qui dispose que « lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception ». Ainsi, en cas de décès de l’employeur, les héritiers doivent respecter la procédure de la notification du licenciement et envoyer par lettre recommandé avec accusé de réception la décision de rupture du contrat de travail pour cause de décès de l’employeur.
Pour les structures mandataires qui apportent leur conseil aux employeurs, une question reste cependant en suspens : comment réagir face à l’absence d’héritiers et faute de succession liquidée par un notaire ? Pour rappel, les structures mandataires sont liées au particulier employeur par un contrat de prestation qui prévoit normalement une résiliation de plein droit du contrat sans pénalités financières et sans préavis en cas de décès du client. Par conséquent, le jour du décès coïncide avec le jour de la fin du contrat de prestation entrainant dans son sillage la fin des devoirs de la structure mandataire notamment dans ses missions de conseil à la fonction d’employeur. La responsabilité de la structure ne peut plus être engagée pour ce qui suit. Néanmoins, il est certain que la situation du salarié du particulier employeur est cruelle dans ce cas : pas d’héritiers, pas de succession, un employeur décédé, quel espoir de récupérer les sommes normalement dues ? Mais après tout, la situation est-elle si différente dans le cas d’une succession refusée par les héritiers ?
« Sont dus au salarié :
-
le dernier salaire ;
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les indemnités de préavis et de licenciement auxquelles le salarié peut prétendre compte tenu de son ancienneté lorsque l’employeur décède ;
-
l’indemnité de congés payés. »
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