Une fin de vie choisie par la personne concernée
Une médecine humaine et un accompagnement professionnel exceptionnel
Septembre 2013 – rédigé par Brigitte LESCUYER (Formations – Conseils)
Oui, nous pouvons choisir de vieillir seul chez soi, y finir ses jours, même malade avec des troubles cognitifs, même lorsque la famille est éloignée de plusieurs centaines de kilomètres.
Je viens vous faire partager les dernières années de vie (d’octobre 2010 à décembre 2012) d’Yvonne, 95 ans, sans enfants, et l’accompagnement exceptionnel construit par des professionnels investis de valeurs humaines et passionnés par leurs missions respectives. Tous ont réussi à faire vivre la volonté d’une femme qui ne voulait pas aller en institution mais mourir chez soi.
Le contexte :
Yvonne était une femme érudite et avait un caractère très affirmé. Elle n’hésitait pas à manifester ses décharges émotionnelles avec souvent une certaine théâtralité quel que soit l’interlocuteur. Assistante sociale de métier, fille de médecin, elle rechignait à aller consulter et craignait la pharmacopée craignant qu’elle ne la rende plus malade qu’elle ne l’était. Durant les séjours d’hospitalisation ou ceux en SSR (Soins de Suite et Réadaptation), elle était parfois malicieuse et demandait à ses visiteurs de jeter les sacs de médicaments amassés qu’elle refusait d’avaler. On ne lui laissait pas la latitude d’être actrice de sa santé et de savoir si oui ou non cela lui convenait de prendre des pilules. Yvonne était une femme digne qui souhaitait simplement avoir la maitrise de sa vie et de ses choix.
Etait-ce un luxe? N’est-ce pas légitime même âgé d’avoir la liberté de discuter les interprétations médicales qui nous concernent ?
Durant les dernières années de sa vie, elle a connu des soucis de santé et a été hospitalisée ponctuellement à plusieurs reprises : compte-tenu des rythmes non choisis, des relations parfois difficiles qu’elle a rencontrées avec des soignants ou des professionnels non soignants et de la perte de sa liberté chérie, elle excluait toute idée de finir sa vie en établissement et revendiquait très souvent la volonté de rester et mourir chez elle (1).
Elle était autonome, indépendante, valide et libre des regards intrusifs des autres jusqu’à son AVC en octobre 2010.
Quelles alternatives s’offraient à la famille sollicitée qui n’avait jusqu’alors que quelques échanges ponctuels par choix de l’intéressée ? Par ailleurs, il existait une antériorité conflictuelle comme il en existe dans tant de familles. Et comme dans de très nombreuses familles devant la tragédie de la maladie et de la dépendance, sa sœur (âgée), ses neveux et nièces ont décidé collégialement en n’ayant que peu de renseignements sur son contexte de vie de faire vivre sa demande : « ne surtout pas aller en institution et mourir chez elle ».
À l’hôpital, l’équipe médicale et sociale n’envisageait pas de la laisser ainsi seule à son domicile, au 4ème étage sans ascenseur, avec des visites régulières de professionnels, le mot « responsabilité » était souvent prononcé. Yvonne connaissait à cette période : des altérations cognitives significatives (nombreuses périodes de confusion, troubles mnésiques, dysphonie) mais manifestait une grande impatience de retourner chez elle. Sa ténacité était surprenante et émouvante et à force de marteler son désir de rentrer chez elle et ayant recouvré également quelques capacités, elle a contribué à convaincre les décideurs des domaines médical et social.
Ainsi est décidé de tenter « l’impossible » en préparant parallèlement une alternative possible en institution. Des dossiers d’entrée en EHPAD sont envoyés, une demande d’APA (2) est effectuée dans la même période. Les neveux et nièces éloignés géographiquement se sont alors organisés pour assurer son retour à domicile dans les meilleures conditions en s’appuyant et en reliant entre eux les différents professionnels de terrain existants ou en en sollicitant de nouveaux.
Il a été difficile de remplir les différents dossiers administratifs car Yvonne refusait de montrer ses papiers. Elle n’arrivait plus à signer les documents et les factures et était paniquée pour remplir sa déclaration d’impôt qui aurait dû être envoyée plusieurs mois auparavant. Elle ne savait plus s’il y avait un locataire dans un studio qu’elle possédait et il lui arrivait de s’interroger sur la fonction d’une cuillère à thé. De plus, elle se méfiait de toutes ces personnes qui venaient un peu trop souvent chez elle à son goût et les menaçait parfois d’un couteau, leur jetait les boites de médicaments ou d’autres objets au visage.
Des inquiétudes supplémentaires sont apparues lorsque professionnels et famille se sont aperçus qu’Yvonne était fortunée. Avec les assistantes sociales de l’hôpital et du CLIC (Centre Local d’Information et de Coordination), la famille a sollicité une mesure de protection judicaire pour l’aider dans la gestion de ses comptes et de ses papiers. La famille tenait à être écartée de la gestion des biens de façon à éviter toute équivoque.
La famille a recensé au gré des appels, des rares visites et des échanges avec les soignants à domicile, toutes les personnes qui avaient été sollicitées par Yvonne et celles qui s’étaient invitées de leur propre initiative. Ainsi une orthophoniste avait dit être envoyée par l’hôpital : l’assistante sociale dudit hôpital a bien précisé qu’aucune démarche de ce type n’avait été faite. Cette orthophoniste avait évalué sur son seul jugement l’isolement et l’abandon -selon ses dires- d’Yvonne et avait sollicité de sa propre initiative une aide à domicile alors que la famille avait déjà missionné deux services à domicile la semaine et les week-ends. Une dame sans formation mais de bonne volonté venait exécuter depuis de nombreuses années diverses tâches (ménage, courses, entretien du linge, repas). Elle ne pouvait plus répondre dorénavant aux problèmes rencontrés ; le logement restait très sale, le linge sale était remis dans l’armoire par Yvonne et des aliments moisis étaient retrouvés régulièrement dans le frigidaire, les repas étaient sommaires et non équilibrés. Malgré le lien d’amitié évoqué par cette employée, une fois qu’elle fut écartée de ses missions d’accompagnement, elle ne rendit plus aucune visite. Il en fut de même pour quelques autres personnes.
Ce qui a été construit autour d’Yvonne :
Un consensus clair entre les neveux et nièces a été construit (ce que faisaient les uns et les autres et les limites d’engagement de chacun) afin de proposer à Yvonne ce plan d’aide et de l’y faire adhérer malgré ses problèmes mnésiques et ses réactions émotionnelles. Elle fluctuait beaucoup et rentrait dans des phases de paniques spectaculaires. Elle s’angoissait sur le pallier la nuit et interpellait les voisins ou les infirmiers, les pompiers ont même été appelés plusieurs fois. Elle a finalement manifesté un soulagement perceptible à cette organisation, sa grande crainte étant de passer pour « une débile ». Cette acceptation reflétait pour les siens un complet changement d’attitude car depuis plusieurs mois elle refusait toute proposition avec indignation, son discours était qu’elle était capable de se débrouiller seule. Elle était dans le déni de ses fragilités. Tous ont construit à son rythme (entre ardeur à vivre toute seule et faire toute seule et son angoisse d’être seule).
La famille a donc tenté de faire vivre la demande et les attentes d’Yvonne afin qu’elle reste chez elle et qu’elle puisse mourir dignement. Ceci n’était envisageable qu’avec l’aval et l’engagement de l’organisation sociale, médicale et judiciaire. Chacun a pris sa place et a construit l’improbable aux yeux de bons nombre d’autres professionnels. Jusqu’au bout, l’accompagnement de la fin de vie d’Yvonne a été conduit par cette équipe : le médecin gériatre de ville, les infirmiers, les deux services d’aide à domicile et l’UDAF, jusqu’au bout dans le moindre détail de la vie et de la fin de vie.
Il a été choisi simplement de communiquer, de se faire confiance et de réajuster chaque jour en fonction des aléas (et ils ont été nombreux), des demandes et de l’état fluctuant d’Yvonne. Le téléphone ponctuellement mais surtout le mail en alliant les adresses e-mail de tous les partenaires ont été les outils. Les informations et les responsabilités étaient partagées et nous savions toujours qui faisait quoi. Si cet accompagnement exemplaire a été possible, c’est grâce au professionnalisme et aux valeurs morales des membres de cette équipe.
L’évolution de l’état de santé d’Yvonne a très vite justifié de construire un accompagnement 24h24, celui-ci a toujours été adapté à son état et non par une justification des postes des uns ou des autres. A une période de 24h/24 suivait un aménagement moins lourd en heures de présence dès qu’Yvonne connaissait moins d’angoisses et paraissait plus sereine. Elle a même pu connaitre le dernier été de sa vie, grâce à un accompagnement adapté, une période de vacances dans la maison de son enfance au pied de ses chères montagnes.
Bien sûr tout cela a été possible car Yvonne financièrement avait une aisance. Durant les périodes de 24h24, la semaine d’accompagnement professionnel coûtait 2500 euros.
Dans cette expérience, il n’y a pas une personne à féliciter plus qu’une autre mais chacune d’entre elle sait que tout cela n’aurait pu se faire sans son adhésion et sa participation active.
TABLEAU D’HONNEUR
De ces professionnels de la ville d’AIX-EN-PROVENCE
– Gériatre de ville –
Mme et M. DEMEYER – Infirmiers
AESP – Association d’aide à domicile – Mme BERETTA et son équipe(Michèle, Alice, Agnès …) : interventions les jours de la semaine et les nuits
APEF – Association d’aide à domicile – M. JUTON et son équipe (dont Éliane) interventions les week-ends et les jours fériés – gérant de la téléassistance
UDAF 13Le Juge des Tutelles, Mme Bailly-Responsable de secteur, Mme Marrou-Tutrice
CLIC
Service social Hôpital
Les sapeurs pompiers
Les voisins
– Le médecin gériatre de ville (3) a accepté d’accompagner Yvonne pour lui permettre une fin de vie digne chez elle. Il a pris le temps de l’écoute, pris le temps d’expliquer, de rasséréner une patiente générant des troubles cognitifs. Il a pris le temps d’échanger avec tous et a su mobiliser les uns et les autres : un médecin qui téléphonait aux auxiliaires de vie, qui tenait compte de leurs observations, de leurs évaluations. Il prenait le temps de lire le cahier de liaison. Un médecin qui s’est déplacé en laissant bien souvent les patients de son cabinet car il était appelé en urgence par des AVS ou les infirmiers. Un homme qui au-delà d’une femme angoissée a vu un être humain et a su lui redonner son humanité. Un soignant qui est loin d’avoir comptabilisé tout son temps passé. Ce gériatre alors qu’Yvonne avait été hospitalisée de nouveau s’est déplacé lors de ses congés à l’hôpital et a argumenté avec les praticiens hospitaliers sur le dispositif mis en place à son domicile afin que soit respectée la demande toujours réitérée d’Yvonne de retourner et mourir chez elle.
– Les infirmiers ont été aussi les piliers de cette organisation. Jours et nuits dans les périodes où il n’y avait pas de 24h/24, ils se sont déplacés pour rasséréner Yvonne, la recoucher. S’ils passaient dans le quartier, ils venaient lui rendre une visite, échanger quelques mots et voir si tout allait bien. Ils travaillaient avec elle son autonomie et la soutenaient également dans les périodes de grand désarroi. La téléassistance les a beaucoup sollicités la nuit également. Avant que cette organisation soit bien ficelée, dans les périodes où ils s’apercevaient qu’Yvonne n’avait pas à manger, ils amenaient un repas réconfortant. Ils avaient leur réseau et géraient leurs absences. Ils ont beaucoup échangé et construit également avec les équipes des services à domicile et bien sûr le médecin.
– Deux services d’aide à domicile qui intervenaient l’un la semaine et toutes les nuits, et l’autre le week-end et les jours fériés ont su construire un travail d’alliance grâce à leur écoute et à leur adaptabilité. Ils ont su communiquer et respecter le travail de chacun. Ils n’étaient pas concurrents, ils accompagnaient avec une quête toujours renouvelée pour s’adapter aux besoins changeants et aux attentes fluctuantes d’Yvonne. Chaque semaine ces deux structures débriefaient sur l’organisation à conduire avec leurs collaboratrices respectives. Ils ont su organiser une ambiance familiale et une chaleur réellement perceptible(4). Le logement sentait le propre, le linge était géré et renouvelé selon les besoins par la responsable du linge, elles l’emmenaient chez le dentiste, l’ophtalmologue, le chirurgien, notamment pour une opération de cataracte, etc. Elles lui concoctaient des petits plats gourmands y compris les jours de fêtes et les achats étaient conduits par la responsable des achats. Chaque semaine et cela ne relevait pas de leur mission, elles lui apportaient des fleurs, des parts de gâteaux sur leur propre initiative car elles savaient toutes combien elle était gourmande. Plusieurs l’emmenaient se promener lorsque ceci était possible et lui permettaient de faire vivre sa passion des parties de scrabble. Ces deux services ont conduit un travail de très grande qualité. Ils étaient des alliés de tous les jours. Ils ont permis grâce à leur écoute des rencontres épanouissantes pour Yvonne qui a trouvé des affections profondes qui ont coloré son regard et touché son cœur. Toutes venaient avec leur fraicheur et leurs qualités d’accueil et d’écoute. Quelques aménagements avaient été faits dans le logement pour leur permettre d’être là au quotidien.
– L’organisme tutélaire et le juge des tutelles ont avalisé ce travail. La responsable de secteur de l’UDAF a été très investie sur ce dossier au démarrage, puis la tutrice, associée aux prises de décision et régulièrement informée de l’évolution de la situation via les échanges de mails, a fait confiance au groupe. Cette instance n’est pas coutumière de ce type de prise en charge mais ils ont accepté le challenge et ont participé activement à cet accompagnement. La tutelle à la personne a été confiée à une nièce et l’UDAF gérait la tutelle aux biens. La nièce gérait le mailing et assurait de sa disponibilité pour gérer la moindre crise.
– Les travailleurs sociaux de l’hôpital.
– Les travailleurs sociaux du CLIC (Centre Local d’Information et de Coordination).
– Les voisins qui ont répondu, y compris la nuit, aux angoisses d’Yvonne sur le palier. Ils étaient informés de l’organisation et y contribuaient ponctuellement. L’une des voisines avait même demandé de ne pas hésiter à la solliciter si besoin était.
Il serait non réaliste de penser que tout a été idyllique, le groupe « professionnels et famille » a connu quelques périodes de flottement et des temps d’adaptation un peu difficiles. Les associations de domicile ont connu des déboires avec des personnels. Ceci a été rare compte-tenu de la durée de notre association. Durant la phase d’embauche, des gens parfois investissent des rôles et révèlent ensuite des pans de personnalité insoupçonnés. Il n’existe pas d’employeurs devins sur les potentialités des uns et des autres. Une fois, une intervenante ne s’est simplement pas présentée au domicile d’Yvonne alors que celle-ci était dans une phase d’angoisse, la professionnelle pourtant savait le contexte. À d’autres périodes, le frigidaire était vide et il a fallu réajuster. Heureusement le groupe a toujours trouvé des solutions.
Nous avons construit des moments professionnels partagés et privilégiés et des échanges sincères. Ces professionnels avaient le souci du détail dans les moindres moments. Ils ont fait vivre ce pourquoi ils se sont mobilisés dans les métiers de l’accompagnement et du soin : ils ont pris le temps (outil fondamental de l’accompagnement). Leur disponibilité sans faille a permis de gérer les impondérables. Tous ont rencontré Yvonne, ont appris à la connaitre et l’ont reconnue dans sa singularité. Ils ont fait vivre un vrai travail pluridisciplinaire, et une qualité de travail exemplaire sans jamais chercher à se faire valoir.
Rester chez soi, seul, malade, dépendant est donc possible avec une équipe qui défend des valeurs humaines, les dérives étaient limitées et certainement pas plus nombreuses qu’en institution.
Quel était le risque finalement ? De ne pas avoir la maitrise sans doute, d’accepter l’autre dans ses fragilités, ses colères, ses indignations, ses contradictions, ses souffrances. Ce groupe a partagé une vie et n’a jamais cherché à la conduire : dans les moments de confusion, Yvonne était guidée mais pas domptée. Ce furent de très belles rencontres !
Lorsqu’Yvonne a été enterrée dans son village natal, dans ses chères montagnes, tous, professionnels et famille avions la satisfaction de lui avoir permis de terminer sa vie selon ses souhaits, dans un confort et une qualité de soins conformes à ses demandes et ses attentes. Et tous redoutaient son départ car tous s’étaient attachés à elle.
« Il n’y a pas de situations désespérées, il n’y a que des hommes qui désespèrent » Winston Churchill
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(1) Elle a connu un épisode dans un SSR qui l’a marqué durablement. Elle critiquait par jeu (c’était une philosophie de vie) spontanément les repas, le manque de disponibilité selon elle des uns et des autres mais savait également reconnaitre le professionnalisme et la gentillesse. Elle était très sensible aux marques d’affection qui la gênaient même parfois. Ses demandes étaient vécus par certains comme des revendications et ont fini par exaspérer certains soignants qui avaient alors le verbe acerbe et un ton peu enclin à une communication ouverte vers le partage, la construction et l’accompagnement. Ainsi un jour qu’elle recevait la visite d’un neveu et d’une nièce, une ASH (agent des services hospitaliers) est entrée dans sa chambre sans frapper pour arranger le lit. Avec détermination, elle a refait le lit en le laissant à la stupeur de ses visiteurs en forme de « V » tellement le drap housse utilisé était peu adapté aux dimensions du matelas. Yvonne interpelle la jeune fille en marquant son étonnement : « Pardon mademoiselle, vous ne pouvez laisser le lit ainsi ? », la jeune fille de répondre avec aplomb et un ton non respectueux : « Je fais avec ce que l’on me donne, si vous n’êtes pas contente, allez voir la direction ».Les visiteurs ont proposé de faire la démarche et Yvonne à leur étonnement a marqué une grande inquiétude voire une angoisse : « Surtout ne faites rien, je ne sors pas de suite, qu’est-ce qui pourrait m’arriver ? ». La crainte des représailles était évidente.
(2) La demande d’APA fut interrompue à la connaissance de son aisance pécuniaire.
(3) L’ancien médecin généraliste d’Yvonne était très interventionniste et n’était pas à l’écoute de sa patiente. Il se focalisait notamment sur un cancer de la peau qu’elle avait et malgré l’avis d’un chirurgien qu’il avait lui-même sollicité, voulait faire pratiquer par un dermatologue une détersion de cette plaie sur la tête (lorsque le chirurgien a appris la démarche de ce médecin, il l’a appelé afin de lui faire entendre de nouveau son désaccord et lui faire comprendre l’impossibilité et la dangerosité à ce stade de faire cette détersion). Par ailleurs, l’approche de ce généraliste pouvait être surprenante : Yvonne n’ayant pas été capable de signer le chèque lors de l’une de ses interventions, il a refusé de se déplacer lorsqu’il a été sollicité une nouvelle fois par les infirmiers qui avaient évalué une urgence et leur a conseillé d’appeler le 15. La famille a alors cherché un médecin qui pourrait être en accord avec l’idée qu’ils avaient d’un accompagnement de fin de vie et de bienveillance.
(4) Créer ou pas des liens affectifs avec son patient/son usager : je reste surprise dans les formations que je dispense de témoignages de très nombreux professionnels qui me racontent qu’ils reçoivent des consignes afin de ne pas créer de liens affectifs avec leur patient. Faut-il rappeler que les émotions sont naturelles, qu’elles sont un langage du corps. Les manifestations affectueuses sont particulièrement bénéfiques pout tout individu, plus encore lorsqu’elles sont partagées. Il serait souhaitable pour un responsable de service à domicile ou d’hébergement pour personnes âgées de recenser les possibles dérives mais surtout de ne pas limiter le bénéfice de cet attachement, de cette affinité, de ce lien. Être regardé avec bienveillance, être reconnu et exister aux yeux de quelqu’un, être apprécié et aimé amicalement est bon pour l’égo et le moral. On ne peut pas dissocier le fonctionnement d’un professionnel de la vie quotidienne, surtout dans l’accompagnement. Limitons la perversité mais ne cloisonnons pas le bon sens.
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