Fontaine, je boirai de ton eau


Publié le : 29/11/2008
Auteur(s) : Jean-Louis Fontaine, président du Collectif des Démocrates Handicapés (CDH)
Résumé : Jean-Louis
Fontaine, récemment élu président du Collectif des Démocrates
Handicapés (CDH), a annoncé que le CDH allait ‘s’inviter’ de façon
constructive dans les prochains débats politiques.

Handicap.fr : C’est quoi le Collectif des Démocrates Handicapés ?
Jean-Louis Fontaine
: Le CDH a été créé en 2000 pour permettre la prise en compte du
handicap au niveau politique. On avait tendance à « faire pleurer dans
les chaumières » en exhibant quelques personnes handicapées mais sans
qu’il ne se passe grand-chose sur le terrain. Nous agissons donc comme
un parti politique qui tente de susciter les débats sur notre société,
sans pour autant défendre un point de vue communautarisme. Nous voulons
une société accessible à tous, à commencer par un domaine vital comme
l’emploi. Il y a des moments où l’on ne peut plus se permettre de
rester discret. Et nous sommes capables de taper du poing sur la table
s’il le faut.

Handicap.fr : Quelles sont vos priorités ?
JLF
: Nous ne défendons pas seulement l’accessibilité physique : c’est ce
qui se remarque le plus mais ce n’est pas forcément ce qu’il y a de
plus important. Nous voulons que les personnes handicapées deviennent
des citoyens à part entière. Il y a encore tant de choses à défendre
dans ce domaine car elles restent en première ligne dans les situations
économiques précaires : gratuité des soins, scandales des franchises
médicales… Vous vous rendez compte que, contrairement à 15 autres
pays, la France n’a toujours pas ratifié la Convention internationale
des droits des personnes handicapées alors qu’elle a été un des
premiers pays à la signer en mars 2007. C’est notre combat prioritaire
et nous comptons bien interpeler le chef de l’Etat sur ce sujet. Elle
promet de grandes avancées en matière de scolarité ou d’accès gratuit
aux soins, ce qui suppose des moyens financiers conséquents. Alors on
comprend pourquoi notre gouvernement n’est pas très pressé…

Handicap.fr : Mais en effet, le handicap coute cher ! Alors comment faire pour mener à bien toutes ces actions ?
JLF
: Vous savez, le handicap génère aussi beaucoup d’argent. Ils sont
nombreux à vivre grassement du handicap, notamment dans le domaine
pharmaceutique, alors que je connais peu de personnes handicapées qui
vivent grassement. La majorité d’entre elles vit en dessous du seuil de
pauvreté.

Handicap.fr : Etes-vous vous-même handicapé ? Vos membres le sont-ils ?
JLF :
Oui, je me déplace en fauteuil roulant et la plupart de nos membres le
sont aussi ou sont touchés par le handicap dans leur famille. Vous
savez, si on prend la définition du handicap, 11.3 millions de
personnes sont concernées. Mais certains de nos membres sont aussi des
élus sympathisants et donc pas directement concernés à titre personnel.
Le CDH rassemble environ 500 membres et nous sommes sur une pente
ascendante.

Handicap.fr : De quelle manière le CDH s’implique-t-il?
JLF
: Il tente d’être présent lors de toutes les grandes échéances
politiques, y compris les élections présidentielles. En 2007, j’étais
directeur de campagne mais nous n’avons pas rassemblé assez de
signatures pour pouvoir nous présenter. Nous serons engagés pour les
élections européennes de 2009 et les régionales de 2010. Nous avons
également des élus qui nous soutiennent à l’Assemblée et au Sénat, de
très bons relais qui permettent de faire entendre notre voix au cœur
des réseaux politiques influents. Il y aura de plus en plus de
questions dans les années qui viennent.

Handicap.fr : Pourquoi ? Vous avez le sentiment que les élus sont de plus en plus sensibles à ces questions ?
JLF
: Oui, c’est certain et, une fois encore, quelle que soit leur
étiquette politique. Même si il en y a une poignée pour lesquels nous
restons très « vigilants ». Certains s’avèrent assez « dangereux » ;
ils profitent des séances de nuit, et donc lorsqu’il n’y a pas grand
monde, pour soumettre des amendements relatifs aux personnes
handicapées. Si nous n’avions pas certains élus responsables pour nous
alerter, des lois inacceptables seraient passées.

Handicap.fr : Vous sous-entendez qu’il existe des élus « handiphobes » ?
JLF
: Je dis surtout qu’ils subissent des pressions de certains lobbies. Il
existe dans certains secteurs (bâtiment, pharmacie, laboratoires…)
des groupes de pression importants qui continuent de jouer un grand
rôle dans l’hémicycle même si, évidemment, la majorité des élus n’en
croquent pas !

Handicap.fr : Quelle est la différence entre une association et un « mouvement d’action politique » comme le vôtre
JLF :
Les associations interviennent sur des revendications précises et
catégorielles, souvent pour défendre en priorité les intérêts de leurs
adhérents. Ce que je ne critique absolument pas d’ailleurs. La plupart
de nos membres militent aussi dans des associations. Notre mouvement
politique a une vision plus globale et revendique une société pour
tous, avec la volonté d’un message très fort à l’intention des
politiques. Nous n’avons pas d’intérêts financiers, ce qui nous laisse
plus libre d’agir. Nos actions s’adressent directement aux décideurs.
Mais il arrive aussi que le CDH se fasse le relais d’associations qui
ont du mal à se faire entendre.

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