NSI : le maillon faible mais coûteux de l’ADMR



auteur :  Groupe Mirabelle

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Dimanche
6 novembre 2011, le Groupe Mirabelle accède enfin aux comptes 2010 de
la « Nouvelle société de services informatiques ADMR », autrement dit
NSI. Soit exactement 12 jours avant l’assemblée générale de l’Union
nationale (UN) ADMR. Pour autant s’il n’est pas facile d’ajuster
correctement ce dernier élément dans le puzzle des comptes de la maison
mère, les enseignements qu’on en retire méritent d’être soigneusement
analysés.



 



Chiffre d’affaires en hausse de 75%

 



Ce
qui frappe, dans les comptes 2010 de NSI, c’est l’augmentation
spectaculaire du chiffre d’affaires : + 75% . Il passe de 2 331 741 € en
2009 à 4 103 079 € en 2010. Sachant que NSI évolue sur un marché fermé
(l’ADMR), cela voudrait-il dire que les fédérations ADMR se sont
massivement équipées en produits NSI en 2010, notamment avec PHILIA le
logiciel de gestion de la relation client ? Cette hypothèse est
cependant difficilement valable, car il est avéré que PHILIA rencontre
de sérieux problèmes de fiabilité et cela retarde son déploiement dans
le réseau, déploiement qui de toute manière aurait pris plusieurs
années.

Si
on regarde les comptes de l’union nationale, on note l’acquisition, en
2010, d’un logiciel pour 2 405 245 €. Il serait tout de même étrange que
ce logiciel n’ait pas été acquis auprès de NSI, d’autant que les
comptes de la filiale et ceux de la maison mère présentent de curieuses
analogies : 2 569 896 € de dettes (tous fournisseurs confondus) dans les
comptes de l’UN et 1 460 506 € de créances clients (identifiées UN)
dans les comptes de NSI…

 



Dès
lors on est en droit de s’interroger : quelle est l’utilité du logiciel
concerné par cette vente importante à la maison mère (un montant de 2,4
M€ non négligeable puisqu’il représente l’équivalent des fonds propres
et réserves de l’UN en dehors des subventions CNSA) ? Et pourquoi
devrait-elle racheter ledit logiciel qui, de fait, lui appartient déjà
par l’intermédiaire de la holding les Domiciliennes dont NSI est une
composante ? Est-ce pour contribuer à l’augmentation du chiffre
d’affaires de NSI et, dans ce cas, pourquoi ?



 



Faibles liquidités, créances gigantesques

 



Il
apparaît donc que près de la moitié du chiffre d’affaires 2010 de NSI
n’a pas été encaissé, avec les conséquences qu’on peut imaginer pour sa
solvabilité.

 



Il
est également important, pour l’avenir, de savoir si le chiffre
d’affaires de NSI devra rester à ce niveau pour couvrir les charges, qui
elles, sont manifestement récurrentes d’une année à l’autre (charges
fixes de personnel notamment même si une amorce de baisse semble engagée
avec le licenciement du directeur adjoint). Pourtant les ventes et
redevances informatiques, liées à l’exploitation de PHILIA qui n’est pas
encore au point, pourront difficilement amortir les lourds
investissements et, dans ce cas, les comptes de NSI risquent fortement
d’être déficitaires en 2011.

 



Il
faut également savoir qu’en terme de solvabilité de NSI, ses liquidités
s’établissaient à 5 800 € au 31 décembre 2010 pour 2 M€ de créances
clients. Il était donc vital que les clients créanciers, principalement
l’UN, payent rapidement, cela a-t-il été réalisé en 2011 ? Du coté des
dettes, on ne note aucun emprunt auprès d’un établissement financier,
mais en revanche 1 669 096 € sont dus (à moins d’un an) auprès de la
holding ADMR les Domiciliennes.



 



Un système de dettes réciproques



Ainsi,
avec les éléments apportés par les comptes 2010 de NSI et de l’Union
nationale (cf notre dossier), il est possible d’établir que le lien
entre les différentes filiales de l’ADMR se construit sur des dettes
réciproques. La question est maintenant de savoir comment celles-ci vont
être honorées puisqu’il est apparent qu’aucune de ces structures ne
dispose des liquidités suffisantes au 31 décembre 2010 sachant que
toutes ces dettes sont à court terme (moins d’un an).






Certes le
25 juin 2010, le « système » a été alimenté en liquidités par le
versement d’un acompte de 1 918 377 € de la CNSA (Caisse nationale de
solidarité et d’autonomie) au titre de la convention de partenariat
signée le 5 mars 2010. Mais quel est le montant total de la subvention
(nous n’avons pas pu nous procurer cette annexe de la convention) ? Et
cette subvention ne doit-elle pas être redistribuée aux fédérations
plutôt que d’alimenter ce système ? Que se passera-t-il quand les
subventions seront épuisées ?



 



Menaces sur la bonne gestion des fédérations

 



Cette
situation économique, pour le moins précaire, résulte de la volonté des
dirigeants de l’ADMR de mettre en place un système d’information
national. Cette volonté légitime a d’ailleurs été suggérée par les
préconisations de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et
confortée par la convention avec la CNSA permettant le financement d’une
partie du système d’information.

 



Ce
n’est donc pas sur le choix stratégique de ce système d’information
qu’il faut se poser des questions, mais plutôt sur son dimensionnement,
la qualité de sa mise en œuvre et enfin la portée politique envers les
fédérations et les associations locales ADMR.

 



En
premier lieu, l’ambition de ce système d’information est-elle adaptée
aux capacités financières et technologiques du réseau ADMR ? Rappelons
que ce système comprend entre autres : le développement complet d’un
logiciel web de la relation client (PHILIA), l’évolution du progiciel de
gestion ADMR (COLIBRI), le développement complet de la télégestion via
la technologie IP (PHILIATEL), la mise en place d’une infrastructure de
télécommunication (contrat Orange), une gestion électronique des
documents centralisée… et en plus le renouvellement des matériels
informatiques !

 



Ce
système devait être conçu, géré et mis en place par NSI. Cette société,
même soutenue par l’UN ADMR, disposait-elle des ressources
(technologiques, humaines et financières) suffisantes pour mener à son
terme un projet d’une telle envergure ?

 



L’état
actuel du système d’information national nous permet d’en douter :
PHILIA connaît de tels dysfonctionnements et lourdeurs d’utilisation
(nécessitant même le développement d’une nouvelle application PHILIA
PRIME, moins complexe paraît-il). À ce jour, moins d’une dizaine de
fédérations utilisent PHILIA pour l’intégralité de leurs associations.
PHILIATEL n’en est qu’à ses balbutiements. Le développement de COLIBRI
en application web est reporté aux calendes grecques. Le contrat Orange
concernant les télécommunications a été diffusé dans le réseau sans
transparence. Quant à la gestion électronique des documents (GED), pas
de nouvelles…

 



Le
coût réel du système d’information national semble dépasser les
prévisions et, par là même, les capacités de l’ADMR. La subvention de la
CNSA (convention initiale) porte uniquement sur l’acquisition de
matériel (poste clients PC et serveurs pour les fédérations et les
associations) à hauteur de 65% pour un montant maximal de 1 894 750 €.
L’ADMR doit donc autofinancer une part les développements informatiques
de NSI sans oublier les 35% du matériel en complément du CNSA.

 



Un
autre problème se dessine : les enjeux politiques liés à la mise en
place de ce système. Rappelons que les nouveaux statuts ADMR de 2008
imposent aux fédérations et aux associations d’adhérer à tous les
produits et services choisis par l’UN ADMR. Il leur faut, en théorie,
embrasser l’ensemble du système d’information national. Mais à la vue
des performances dudit système, il paraît difficile de blâmer celles qui
tentent d’y échapper. Cependant, ces mêmes fédérations et associations,
en cherchant à utiliser des outils qu’elles jugent plus performants que
ceux proposés par l’UN, se voient interdire toute possibilité de
financement CNSA de leur matériel informatique, financement réservé
exclusivement aux seuls utilisateurs du système national ADMR.



Bonjour la logique et adieu la bonne gestion !



Comptes NSI 2010

 

L’avis de Mirabelle

NSI est l’un des principaux points faibles de l’ADMR aujourd’hui : une
société informatique qui développe des logiciels coûteux et peu
performants dont les clients (fédérations et associations ADMR) sont
captifs. De plus, la société est dans une situation financière critique
qui emporte avec elle l’UN ADMR et ses filiales par la valse de dettes
réciproques.

La volonté de mettre en place un système national n’est pas en cause, au
contraire, mais il est évident que ce dernier n’a pas été correctement
conçu, pensé et mis en oeuvre. Pourtant, un poste de Directeur des
systèmes d’informations a été créé à cet effet en 2008.

Il paraît urgent de réagir. Pourquoi l’ADMR souhaite-t-elle un système
d’information aussi fermé sur lui-même (aucune interopérabilité n’est
possible avec les logiciels existants du marché) ? C’est une erreur
manifeste, car ceci oblige NSI à développer tout elle-même or, nous
avons constaté qu’elle n’en avait tout simplement pas les capacités. Il
serait plus judicieux d’utiliser des produits externes développés par
des prestataires informatiques spécialisés (logiciel de planning,
infocentre, paye, comptabilité…) et de ne développer que les
interfaces entre ces différents produits ou les applications vraiment
très spécifiques. La performance et le coût seraient certainement
meilleurs, car ces produits sont déjà, en partie, amortis par les
utilisateurs externes à l’ADMR. Cela permettrait plus de souplesse pour
les fédérations et associations ADMR qui ne seraient plus « contraintes »
de la même façon et qui pourraient ainsi accéder aux financements de la
Caisse nationale de solidarité et d’autonomie (CNSA).

Il serait intéressant que le réseau ADMR (fédérations et associations)
disposât des bilans simplifiés établis chaque année pour justifier de la
bonne utilisation des fonds auprès de la CNSA conformément à l’article 6
de la convention de partenariat. Ainsi, le réseau pourrait savoir en
toute transparence si la totalité des fonds perçus a été reversée aux
fédérations, à quelles fédérations et dans quelles conditions.

Par ailleurs, compte tenu des nombreux dysfonctionnements constatés, il
paraîtrait souhaitable de faire réaliser le plus rapidement possible un
audit externe sur le système d’information national de l’ADMR et
notamment sur la société NSI.

 



Cet article n’engage que ses auteurs et en aucune manière www.lamaisondelautonomie.com ou l’association Synergie.