Les services mandataires d’aide à domicile sont apparus à la faveur de dispositions législatives de 1975 et de 1987. Ils se sont développés dans les années 90 notamment grâce aux lois du 31 décembre 1991 et du 29 janvier 1996 en faveur du développement des emplois de services aux particuliers et à sa circulaire d’application du 6 août 1996. Aujourd’hui, ces services sont régis par l’article L 129-2 du code du travail. 

Définition des services mandataires

Ces services mandataires d’aide à domicile assurent, pour le compte de particuliers-employeurs, un mandat tel que défini par l’article 1984 du code civil : «Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom. Le contrat ne se forme que par l’acceptation du mandataire.».

Ils ont pour missions le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs ainsi que, pour le compte de ces dernières, l’accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l’emploi de ces travailleurs.

Ces services à domicile ne sont pas employeurs des intervenants au domicile.

Missions d’un service mandataire

Leurs missions, qui visent à accompagner les particuliers employeurs dans la relation de travail vis-à-vis de leur salarié, peuvent être les suivantes :

  1. L’évaluation de la situation du particulier et sa demande ou ses besoins ;
  2. La sélection des candidats à présenter au particulier employeur et la proposition de leur remplacement le cas échéant ;
  3. L’organisation si besoin de la visite médicale du salarié choisi par le particulier ;
  4. La proposition au particulier, le cas échéant, du niveau de rémunération le plus adapté
  5. L’élaboration du contrat de travail pour le compte du particulier ;
  6. L’immatriculation du salarié auprès de l’URSSAF ;
  7. L’élaboration du bulletin de paye, de l’attestation ASSEDIC, des certificats de travail, sur instruction du particulier et pour son compte ;
  8. L’élaboration et la transmission aux salariés, sur instruction du particulier, toutes attestations ou pièces à produire auprès des organismes sociaux (sécurité sociale, IRCEM, CNAV) ou fiscaux ;
  9. L’élaboration, sur instruction du particulier, des déclarations nominatives à l’URSSAF ;
  10. L’appui et le conseil au particulier dans sa fonction d’employeur.

A la différence de l’emploi direct (appelé plus communément gré à gré), les services mandataires ont le devoir d’orienter les personnes vers le service le plus adapté à partir de l’évaluation des besoins mais également en portant à la connaissance de chacun les avantages et les inconvénients du recours au service mandataire.

Danger du mode mandataire pour les services à domicile

Cependant, les services à domicile se doivent d’être très prudent. La jurisprudence est plus qu’éloquente concernant la requalification du personnel mandataire en personnel prestataire. Même si certaines demandes de «salariés » sont rejetées, le risque, il faut le reconnaitre, est très grand (en plus de la perte de temps en procédure et honoraire d’avocat).

La requalification employeur

Il est en effet nécessaire de rappeler un arrêt de la Cour d’appel de Montpellier qui a condamné une structure mandataire en tant qu’employeur. Outre que le service à domicile payait le salaire et les charges, la personne âgée était atteinte de la maladie d’Alzheimer et n’était donc pas en situation d’exercer normalement son rôle d’employeur. La Cour d’appel a donc décidé qu’en « sa qualité d’intervenant agréé spécialisé auprès de personnes très âgées et dépendantes, l’association est parfaitement en mesure et doit avoir pour bonne pratique de veiller à garder en toutes circonstances une intervention adaptée aux besoins de ses bénéficiaires, y compris au plan juridique, en proposant explicitement le moment venu de passer du rôle de mandataire à celui de prestataire ».

Par ailleurs, il faut noter une forte tendance à reconnaitre la responsabilité des organismes mandataires du fait de défauts d’information et de conseil des organismes mandataires vis-à-vis de leurs clients employeurs…

Mais le danger peut venir aussi du client en service mandataire….

Après leur licenciement, deux assistantes de vie d’un particulier-employeur ont saisi le conseil des prud’hommes en vue d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires et des dommages et intérêts pour licenciement abusif. Le particulier-employeur appelle donc le service à domicile mandataire en garantie, pour qu’elle soit condamnée à lui garantir le paiement des sommes auxquelles il pourrait être condamné vis-à-vis des salariés.

Alors que la Cour de Versailles avait rejeté cet appel en garantie, la Cour de cassation décide au contraire que le service à domicile aurait dû vérifier la conformité des bulletins de paie sur la base des informations qu’elle aurait dû recueillir pour les établir.

Nous pouvons donc nous interroger sur le maintien d’un service mandataire au sein d’un service à domicile qui intervient pour la plupart du temps pour des personnes dites fragilisées… Est-ce « politiquement correct » pour un service à domicile de laisser (ou rendre) employeur une telle personne au risque de la laisser « aller devant les prud’hommes » ? Il arrive assez souvent (trop ?) qu’une personne âgée soit employeur alors qu’elle est atteinte de troubles qui l’empêchent d’exercer un quelconque contrôle sur la personne employée à son domicile.

Il faut savoir qu’il y a un risque par le fait que l’employeur (personne âgée ou fragile) ne peut ou ne veut pas assumer son rôle d’employeur. Parfois, voire souvent, le particulier employeur ne veut pas assumer son rôle de particulier-employeur, notamment en ce qui concerne son autorité hiérarchique (Le particulier employeur ne veut pas procéder à l’entretien de licenciement, ne veut pas remettre une lettre d’avertissement, n’ose pas faire de reproches au salarié sur la qualité de son travail).

Ainsi, le service à domicile risque de se voir considéré comme employeur de fait, dès lors qu’il exerce tout ou partie des prérogatives de l’employeur (embauche, commandement dans l’exécution du travail, fixation des dates de congés, décision de sanction disciplinaire…).

Aussi, pour éviter cet écueil, nous invitons les services à domicile mandataires de s’abstenir d’empiéter sur les prérogatives du particulier-employeur. Ce dernier doit :

  1. choisir le salarié qu’il recrute ;
  2. signer le contrat de travail ;
  3. définir les horaires et la nature du travail ;
  4. payer directement le salaire et les cotisations afférentes ;
  5. signer l’ensemble des documents (demandes d’immatriculation, déclarations, attestations…) relatifs à l’emploi.

Les services à domicile ne doivent pas oublier que la Cour de cassation, pour déterminer le véritable employeur, « regarde » l’âge de la clientèle qui constitue un indice pour qualifier l’organisme d’employeur.

Aussi, pour conclure, nous serions tentés de conseiller aux services mandataires de ne pas conclure de contrat de mandat avec des personnes dont l’état ne permet pas d’assumer les obligations liées à l’emploi d’un intervenant à domicile…ou, du moins, de faire preuve d’une extrême prudence.

Pour information, réponse ministérielle du 28 novembre 1994 (N°18097)

Texte de la question :

« M. Gilbert Biessy attire l’attention de M. le ministre du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle sur la situation particulière de certaines associations dite « intermédiaires ». Ces associations, venant au secours de personnes âgées ou temporairement en difficultés, les mettent en relation avec des aides ménagères et se chargent par ailleurs de pourvoir à l’ensemble des formalités administratives nécessaires vis-à-vis des URSSAF, ou des caisses de retraite. Animées par un souci de solidarité, ces associations utilisent leurs fonds propres pour aider les familles qui ne pourraient pas a elles seules subvenir aux émoluments d’une aide ménagère. Pour autant, leur activité se borne à cela, sans qu’il soit jamais établi de hiérarchisation des rapports entre associations et aides ménagères. Ces dernières, agissant à titre personnel, peuvent refuser des vacations, et même des familles. L’URSSAF tend cependant à considérer de telles associations comme employeurs, ce qui, fonctionnellement, est faux, mais s’avère lourd de conséquences quant a la nature et au volume des obligations mutuelles entre associations et aides ménagères (les véritables employeurs restant en l’occurrence les personnes aidées qui mandatent les associations). Cette appréciation de l’URSSAF ne manquera pas de poser de sérieuses difficultés aux associations intermédiaires (formalités administratives nombreuses et complexes pour gérer de multiples employeurs sur de multiples aides ménagères) et engagera ces associations vis-à-vis des aides ménagères. A terme, c’est un service rendu de très grande importance qui risque d’en pâtir. C’est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui confirmer que de telles associations qui gèrent la mise en relation de personnes entre elles ne peuvent être considérées comme employeurs de ces dernières selon les organismes publics et parapublics. »

Texte de la réponse :

« Les associations intermédiaires ont pour objet l’embauche de personnes dépourvues d’emploi et connaissant des difficultés de réinsertion en vue de les mettre a disposition de personnes physiques ou morales pour exercer des activités qui ne sont pas déjà assurées par l’initiative privée ou l’action des collectivités publiques ou des organismes bénéficiant de ressources publiques. Elles sont donc toujours employeurs des personnes travaillant chez les utilisateurs. Les associations dites « mandataires » sont des associations qui ont reçu d’une personne physique – généralement une personne âgée ou handicapée – mandat pour l’aider à recruter le salarie dont elle a besoin et gérer l’ensemble des formalités liées a cet emploi. Le particulier est, dans ce cas, employeur de la personne travaillant a son domicile. L’association risque néanmoins de se voir considérée comme employeur de fait, des lors qu’elle exerce tout ou partie des prérogatives de l’employeur (décision d’embauche, commandement dans l’exécution du travail, fixation des dates de congés, décision de sanction discipline, etc.). Indépendamment du contentieux possible avec une URSSAF, la requalification des relations contractuelles existant entre l’association, le particulier et le salarie peut être opérée par le juge du contrat de travail. Pour éviter cet écueil, les associations mandataires doivent s’abstenir d’empiéter sur les prérogatives du particulier employeur, qui doit notamment : – rester libre de choisir le salarie qu’il recrute ; – signer le contrat de travail ; – définir les horaires et la nature du travail ; – payer directement le salaire et les cotisations afférentes ; – signer l’ensemble des documents (demandes d’immatriculation, déclarations, attestations, etc.) relatifs a l’emploi. Il est en outre vivement recommande que ces associations prennent contact, des le début de leur activité, avec l’URSSAF qui pourra, d’une part leur apporter une information complémentaire, d’autre part leur accorder certaines facilites de gestion. Le particulier est, dans ce cas, employeur de la personne travaillant à son domicile. »

Laurent FOUCAULT GIROUX