Éthique et vieillissement 

Edition : Gérontologie et société (Fondation nationale de Gérontologie

N° 144 – Mars 2013

ISBN : 0151-0193

Depuis une vingtaine d’années, l’éthique est et reste à la pointe « de la mode », amenant sans cesse de nouveaux champs de l’existence à lui être confrontés (« éthique et politique », « éthique et capitalisme », « éthique et médecine » etc.). Mais cette prolifération sémantique est paradoxalement le signe d’une incapacité à fonder le champ de l’éthique de façon légitime. Un fossé béant apparaît entre la « demande d’éthique » et la solidité philosophique d’éventuels principes fondamentaux. Les repères traditionnels de la morale s’estompent au sein de la société et on parle d’un « vide éthique » où prend place un individualisme hédoniste et narcissique. À répéter à l’envi que l’idéal humain est celui de l’autonomie et de la performance et que son envers abhorré est celui de la dépendance, la manière d’envisager l’avancée en âge est devenue de plus en plus problématique. Une maltraitance dont on parle peu, se déploie à travers cette idéologie de l’autonomie qui finit par contaminer les personnes âgées elles-mêmes en les amenant à penser qu’elles sont un poids pour les autres et qu’« il faut savoir partir ». Derrière l’exhibition du thème de « la mort dans la dignité » peut ainsi se profiler des arrière-pensées utilitaristes beaucoup moins reluisantes et qui de proche en proche, minent « éthiquement » l’ensemble de la société contemporaine.

Un enjeu de taille se présente alors à nous : plutôt que de s’enfoncer dans une civilisation du déni de ce qui fait le propre de l’homme, les personnes âgées pourraient bien jouer le rôle de « cogito éthique » en nous permettant de fonder solidement ce domaine de la pensée à partir de la vulnérabilité qui est la leur : la personne âgée est une des figures de la vulnérabilité qui révèle immanquablement la place d’une obligation humaine. Nous serions donc dépendants des personnes âgées pour réapprendre ce que c’est que d’être un homme.

Ce numéro, nourri notamment de réflexions issues de l’École éthique de la Salpêtrière et coordonné par Bertrand Quentin, met en lumière que le vieillissement n’est pas une menace mais qu’il s’inscrit dans la logique métamorphique de la vie qu’il nous faut assumer comme telle, avec ses difficultés mais aussi ses richesses. Il est l’occasion de renouer avec certains fondamentaux qui donnent sens à l’ensemble de l’existence humaine.

Contact : Catherine DUMOUTIER – 01 55 74 67 02 
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